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Mad in prison

Le paysage pénitencier français voit depuis 2009 naitre un nouveau type de structure. L'UHSA entité chimérique, mi-prison mi-HP, dont la mission est d'offrir une prise en charge adaptée à des personnes soumises au régime carcéral ET necessitant une hospitalisation en psychiatrie.

Je m'interroge.

Il existe pourtant toujours des experts dont le rôle est d'évaluer l'état de santé mentale des délinquants et criminels et de séparer le judiciaire du médical. Alors quelles sont celles et ceux qui justifient l'aménagement d'une prison sur le sol de la psychiatrie?
Je vous propose d'y jeter un oeil.

La structure est entourée d'un long mur de béton dans laquelle se découpe une porte en acier blindée sans poignées. Il faut sonner pour entrer. Un déclic indique l'ouverture de la serrure on entre. Ici commence la prison. On salut les collègues de l'administration pénitencière, on se prête machinalement aux contraintes de sécurité. Succession de grilles et de sas, une nouvelle porte, blindée, pas de poignées. Un dernier sourire à la caméra, la serrure claque. On quitte le monde des hommes en bleu pour celui des hommes en blancs.

Ici on tente d'insérer le mieux possible un cadre hospitalier au sein d'un cadre carcéral nécessairement très contraignant. Le patient est soumis non seulement au règlement pénitencier mais aussi aux contraintes hospitalières... On peut à présent priver quelqu'un de sa liberté d'aller en prison...!! Incroyable!!.. Et pourtant...

Si l'on fait un tour d'horizon des âmes peuplant les couloirs, on pourra croiser le regard étrange d'un psychotique psalmodiant d'une voix basse et incompréhensible des incantations destinées à une entité inconnue, saluer d'une franche poignée de main un "caïd" persécuté par un délire émanant d' angoisses bouillonnantes derrière une façade de dur à cuire, jeter un coup d'oeil au hublot d'une chambre afin de s'assurer de l'intégrité d'un dépressif catatonique terrifié par la seule idée du retour en détention.

Ce qui apparaitra, c'est que pour beaucoup de ces personnes, qu'elles soient persécutées, faibles, délirantes ou marginales, le système carcéral n'est pas adapté. On comprend alors qu'au delà des soins, on garantie une forme de protection. On note d'ailleurs bien souvent qu'à elle seule, l'exctraction du systeme carcéral peut être considérée comme une mesure thérapeutique. On a construit pour cela un mur derrière le mur. Un asile est offert... certains mots ne trompent pas.

Mais n'est-ce pas une tentation dangereuse que celle de pouvoir s'assurer une garantie de soins psychiatriques derrière les barreaux et de ne plus avoir à soulever la question de l'irresponsabilité du fou ?

Et que cela ne nous prive pas d'aborder le caractère pathogène des conditions de détention ni l'incapacité de l'institution à garantir un lieu de réinsertion pour les détenus. Elle se contente d'enfermer et de laisser régner une forme de “loi du milieu”, d'isoler les éléments les plus marginaux afin qu'ils ne troublent l'ordre établi, d'écarter ceux dont l'état de santé mentale devient révélateur d'un dysfonctionnement du système.

Soigne t'-on les fous mis en prisons ou ceux qu'elle produit elle même ?

La prison serait-elle devenue le dernier lieu de soin ?

La présence de portes blindées à l'HP ne règle en rien les défaillances du système ; les moyens mis en oeuvre ne le sont que pour les masquer, n'est-ce pas comme mettre un bandage propre sur une plaie gangrénée?...

Je m'interroge.

Posté le 11/02/2013


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